Votre logement est livré en retard, vous disposez d’un recours.
La construction qui s’éternise est l’un des cauchemars des acheteurs de logements neufs.
La situation est loin d’être rare : souvent, le retard est de quelques mois. Parfois davantage…
Les conséquences financières d’un tel retard peuvent être lourdes pour les acheteurs, qui ne sont pas toujours bien protégés par la loi.
Eminez si les retards sont bien légitimes
Les promoteurs se retranchent souvent derrière des motifs présentés comme « légitimes » pour justifier les retards, et échapper à toute indemnisation. De nombreux contrats mentionnent, au titre des motifs légitimes, les intempéries et les liquidations judiciaires d’entreprises participant à la construction.
Les clauses légitimes figurant dans le contrat s’imposent à l’acquéreur. Mais on peut parfois discuter du délai de décalage qui en découle.
Il est également arrivé à la justice de refuser de retenir comme motif légitime de retard la faillite d’une entreprise chargée des finitions : si c’est le peintre, par exemple, qui a cessé son activité, cela ne saurait justifier des mois de retard !
Exigez les pénalités de retard prévues au contrat…
Les démarches pour demander une indemnisation sont plus simples lorsque des pénalités de retard sont expressément prévues dans le contrat. La loi l’impose pour les maisons achetées via un contrat de construction de maison individuelle (CCMI).
Ce type de contrat doit prévoir des pénalités d’au moins 1/3 000 du prix de vente par jour de retard – soit, par exemple, 100 € par jour pour un logement acheté 300 000 €.
Il n’existe pas de clause obligatoire sur des pénalités de retard dans les contrats de vente en l’état futur d’achèvement (VEFA).
Réclamez un dédommagement en le justifiant
À moins d’avoir exigé que le promoteur mentionne des pénalités de retard à la signature du contrat, il est à craindre que ce dernier soit muet sur le dédommagement en cas de retard.
À défaut de pénalités automatiques, l’éventuel dédommagement devra être minutieusement justifié.
Il faudra estimer votre préjudice et réclamer l’indemnisation par lettre recommandée avec avis de réception (LRAR).
Faites cette demande si vous contestez (totalement ou en partie) la légitimité des causes de retard avancées par le promoteur. Mais n’hésitez pas à la tenter même si les retards semblent indépendants de la volonté du promoteur.
Mettez le promoteur en demeure d’achever la construction
Parfois, la situation est si dégradée que la préoccupation n’est pas tant d’obtenir une indemnisation que de s’assurer que la construction pourra bel et bien être terminée… C’est notamment le cas si le chantier est arrêté sans que vous ayez aucune explication.
Pour ces situations les plus graves, il faut d’abord mettre en demeure le promoteur d’achever la construction – étape indispensable avant d’autres démarches.
Enjoignez-lui, par une mise en demeure LRAR, de vous livrer le logement dans les délais prévus.
Faute d’avoir obtenu la livraison du logement après la mise en demeure, vous pourrez faire jouer la garantie financière d’achèvement, obligatoire pour les achats de logement sur plan.
Le garant a pour rôle de prendre le relais en cas de défaillance du promoteur. Il s’agit généralement d’une banque ou d’une compagnie d’assurances, dont les coordonnées et l’attestation de garantie figurent dans le contrat de vente.
Envisagez une procédure de résolution de la vente
Dans certains cas, le retard est tellement important qu’il peut justifier l’annulation de la vente.
Il s’agit alors d’engager une procédure pour demander la résolution de la vente devant le tribunal judiciaire.
Le promoteur devra rendre l’argent déjà versé mais cette procédure prendra de dix-huit mois à deux ans.
Demandez la suspension de votre prêt au Tribunal
Faire jouer la garantie d’achèvement ou obtenir la résolution de la vente n’est pas toujours possible, ou prend du temps.
En attendant, l’acheteur a intérêt à tenter d’obtenir la suspension de son prêt, afin d’être soulagé financièrement des conséquences du retard.
Cette possibilité est prévue par le code de la consommation (article L. 313-44).
Commencez par demander un rendez-vous à la banque pour expliquer la situation et tenter d’obtenir la suspension à l’amiable. Un avenant au prêt devra alors être signé.
Sinon, il faudra faire la demande de suspension du prêt en justice.
Dès lors que l’immeuble n’est pas livré et qu’une procédure contre le promoteur est en cours, on demandera au tribunal de suspendre le prêt dans l’attente de l’examen de l’affaire sur le fond.
Toutefois, la procédure suppose d’engager des frais d’avocat spécialisé en droit bancaire mais les sommes en jeu étant élevées, une telle dépense peut se justifier.
Combien faut-il réclamer ?
Faute de pénalités fixées dans le contrat de vente, c’est à vous d’évaluer les conséquences financières que vous cause le retard. Soyez précis et complet : si l’affaire doit se terminer au tribunal, l’indemnisation accordée par le juge ne pourra s’appuyer que sur les dépenses dûment justifiées.
Pour le prêt qui finance le logement, prenez en compte l’assurance du prêt et les intérêts intercalaires que vous devez verser pendant la période de retard.
Si le logement doit être votre résidence principale, les frais engagés pour vous loger ailleurs sont à comptabiliser.
Un déménagement reporté d’un mois en dernière minute peut aussi occasionner des frais (garde-meubles, hôtel…).
En tout état de cause, vous devrez produire en justice des justificatifs.
S’il s’agit d’un logement destiné à la location, comptabilisez le nombre de loyers perdus.
Évaluez aussi l’éventuelle perte de l’avantage fiscal. En effet, le dispositif d’investissement locatif Pinel impose un délai maximal de trente mois entre la signature de l’acte d’achat chez le notaire et l’achèvement des travaux : si ce délai est dépassé, l’avantage fiscal disparaît.